Frantz Fanon

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Frantz Fanon (1959)

Frantz Fanon (Fort-de-France, 20 juillet 1925 - Washington DC, 6 décembre 1961) est un psychiatre et essayiste français. Il est l'un des fondateurs du courant de pensée tiers-mondiste. Il a cherché à analyser les conséquences psychologiques de la colonisation sur le colonisé. Dans ses livres les plus connus, il analyse le processus de décolonisation sous l'angle sociologique, philosophique et psychiatrique. Mais il a également écrit des articles importants dans sa discipline, la psychiatrie.

Citations[ред.]

Peau noire, masques blancs, 1952[ред.]


Vers un nouvel humanisme…
La compréhension des hommes…
Nos frères de couleur…
Je crois en toi, Homme…
Le préjugé de race…
Comprendre et aimer…

De partout m’assaillent et tentent de s’imposer à moi des dizaines et des centaines de pages. Pourtant, une seule ligne suffirait. Une seule réponse à fournir et le problème noir se dépouille de son sérieux.
  • « Peau noire, masques blancs » (1952), dans Œuvres, Frantz Fanon, éd. La Découverte, 2011  (ISBN 978-2-7071-6970-9), chap. Introduction, p. 63


Pour nous, celui qui adore les nègres est aussi « malade » que celui qui les exècre. Inversement, le Noir qui veut blanchir sa race est aussi malheureux que celui qui prêche la haine du blanc.
  • « Peau noire, masques blancs » (1952), dans Œuvres, Frantz Fanon, éd. La Découverte, 2011  (ISBN 978-2-7071-6970-9), chap. Introduction, p. 64


Chaque fois qu’un homme a fait triompher la dignité de l’esprit, chaque fois qu’un homme a dit non à une tentative d’asservissement de son semblable, je me suis senti solidaire de son acte.
  • « Peau noire, masques blancs » (1952), dans Œuvres, Frantz Fanon, éd. La Découverte, 2011  (ISBN 978-2-7071-6970-9), chap. En guise de conclusion, p. 247


Mon ultime prière :
Ô mon corps, fais de moi toujours un homme qui interroge !
  • « Peau noire, masques blancs » (1952), dans Œuvres, Frantz Fanon, éd. La Découverte, 2011  (ISBN 978-2-7071-6970-9), chap. En guise de conclusion, p. 251


Racisme et culture, 1956[ред.]

Le racisme n'est pas un tout mais l'élément le plus visible, le plus quotidien, pour tout dire, à certains moments, le plus grossier d'une structure donnée.
  • Pour la révolution africaine, Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2001, p. 39


Le colonialisme impose la répétition de l'identique culturel comme un destin, fonctionnel à sa propre stabilité. Comme conséquence la culture des colonisés, "autrefois vivante et ouverte sur l'avenir", écrasée par l'oppression militaire, économique et symbolique du colonisateur, se ferme, figée dans le statut colonial, prise dans la carcan de l'oppression. A la fois présente et momifiée elle atteste contre ses membres. Elle les définit en effet sans appel.
  • Pour la révolution africaine, Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2001, p. 41


L'An V de la révolution algérienne, 1959[ред.]


le colonialisme se bat pour renforcer sa domination et l'exploitation humaine et économique. Il se bat aussi pour maintenir identiques l'image qu'il a de l'Algérien et l'image dépréciée que l'Algérien avait de lui-même.
  • L'An V de la révolution algérienne (1959), Frantz Fanon, éd. La Découverte, 2001, p. 12


Le peuple colonisé est idéologiquement présenté comme un peuple arrêté dans son évolution, imperméable à la raison, incapable de diriger ses propres affaires, exigeant la présence permanente d'une direction. L'histoire des peuples colonisés est transformée en agitation sans aucune signification et, de ce fait, on a bien l'impression que pour ces peuples l'humanité a commencé avec l'arrivée de ces valeureux colons.
  • L'An V de la révolution algérienne (1959), Frantz Fanon, éd. La Découverte, 2001, p. 176


Les Damnés de la Terre, 1961[ред.]


Le langage du colon, quand il parle du colonisé, est un langage zoologique. On fait allusion aux mouvements de reptation du Jaune, aux émanations de la ville indigène, aux hordes, à la puanteur, aux pullulements, aux grouillements, aux gesticulations. Le colon, quand il veut bien décrire et trouver le mot juste, se réfère constamment au bestiaire.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 45


Chaque fois qu'il est question de valeurs occidentales, il se produit, chez le colonisé, une sorte de raidissement, de tétanie musculaire. [...] Or il se trouve que lorsqu'un colonisé entend un discours sur la culture occidentale, il sort sa machette ou du moins il s'assure qu'elle est à portée de sa main. La violence avec laquelle s'est affirmée la suprématie des valeurs blanches, l'agressivité qui a imprégné la confrontation victorieuse de ces valeurs avec les modes de vie ou de pensées des colonisés font que, par un juste retour des choses, le colonisé ricane quand on évoque devant lui ces valeurs.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 46


Pour le peuple colonisé, la valeur la plus essentielle, parce que la plus concrète, c'est d'abord la terre: la terre qui doit assurer le pain et, bien sûr, la dignité. Mais cette dignité n'a rien à voir avec la dignité de la personne humaine. Cette personne humaine idéale, il n'en a jamais entendu parler…
  • Les Damnés de la Terre, Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 47-48


Le colon fait l'histoire. Sa vie est une épopée, une odyssée. Il est le commencement absolu : "Cette terre, c'est nous qui l'avons faites." Il est la cause continuée : "Si nous partons, tout est perdu, cette terre retournera au Moyen-Age." En face de lui, des êtres engourdis, travaillés de l'intérieur par les fièvres et les "coutumes ancestrales", constituent un cadre quasi minéral au dynamisme novateur du mercantilisme colonial.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 52-53


Les nations européennes se vautrent dans l'opulence la plus ostentatoire. Cette opulence européenne est littéralement scandaleuse car elle a été bâtie sur le dos des esclaves, elle s'est nourrie du sang des esclaves, elle vient en droite ligne du sol et du sous-sol de ce monde sous-développé. Le bien-être et le progrès de l'Europe ont été bâtis avec la sueur et les cadavres des Nègres, des Arabes, des Indiens et des Jaunes. Cela nous décidons de ne plus l'oublier.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 94


Si les conditions de travail ne sont pas modifiées il faudra des siècles pour humaniser ce monde rendu animal par les forces impérialistes.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 98


Le colonialisme et l'impérialisme ne sont pas quitte avec nous quand ils ont retiré de nos territoires leurs drapeaux et leurs forces de police. Pendant des siècles les capitalistes se sont comportés dans le monde sous-développé comme de véritables criminels de guerre. Les déportations, les massacres, le travail forcé, l'esclavagisme ont été les principaux moyens utilisés par le capitalisme pour augmenter ses réserves d'or et de diamants, ses richesses et pour établir sa puissance. Il y a peu de temps, le nazisme a transformé la totalité de l'Europe en véritable colonie. Les gouvernements des différentes nations européennes ont exigé des réparations et demandé la restitution en argent et en nature des richesses qui leur avaient été volées [...]. Pareillement nous disons que les États impérialistes commettraient une grave erreur et une justice inqualifiable s'ils se contentaient de retirer de notre sol les cohortes militaires, les services administratifs et d'intendance dont c'était la fonction de découvrir des richesses, de les extraire et de les expédier vers les métropoles. La réparation morale de l'indépendance nationale ne nous aveugle pas, ne nous nourrit pas. La richesse des pays impérialistes est aussi notre richesse.[...] L'Europe est littéralement la création du tiers monde.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 99


Politiser les masses, ce n'est pas, ce ne peut pas être faire un discours politique. C'est s'acharner avec rage à faire comprendre aux masses que tout dépend d'elles, que si nous stagnons c"est de leur faute et que si nous avançons c'est aussi de leur faute, qu'il n'y a pas de démiurge, qu'il n'y a pas d'homme illustre responsable de tout, mais que le démiurge c'est le peuple et que les mains magiciennes ne sont en définitive que celles du peuple.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 187


Au bout d'un ou deux siècles d'exploitation se produit une véritable émaciation du panaroma culturel national. La culture nationale devient un stock d'habitudes motrices, de traditions vestimentaires, d'institutions morcelées. On y décèle peu de mobilité. Il n'y a pas de créativité vraie, pas d'effervescence. Misère du peuple, opression nationale et inhibition de la culture sont une seule et même chose. Après un siècle de domination coloniale, on trouve une culture rigidifiée à l'extrême, sédimentée, minéralisée.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 227


Quittons cette Europe qui n'en finit pas de parler de l'homme tout en le massacrant partout ou elle le rencontre, à tous les coins de ses propres rues, à tous les coins du monde.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 301


Cette Europe qui jamais ne cessa de parler de l'homme, jamais de proclamer qu'elle n'était inquiète que de l'homme, nous savons aujourd'hui de quelles souffrances l'humanité a payé chacune des victoires de son esprit.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 302


Dans décolonisation, il y a donc exigence d'une remise en cause intégrale de la question coloniale. Sa définition peut, si on veut la décrire avec précision, tenir dans la phrase bien connue: "les derniers seront les premiers." La décolonisation est la vérification de cette phrase. C'est pourquoi, sur le plan de la description, toute décolonisation est une réussite.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 40


La première chose que l'indigène apprend, c'est à rester à sa place, à ne pas dépasser les limites; c'est pourquoi les rêves de l'indigène sont des rêves musculaires, des rêves d'action, des rêves agressifs. Je rêve que je saute, que je nage, que je cours, que je grimpe. Je rêve que j'éclate de rire, que je franchis le fleuve d'une enjambée, que je suis poursuivi par une meute de voitures qui ne me rattrapent jamais. Pendant la colonisation, le colonisé n'arrête pas de se libérer entre neuf heures du soir et six heures du matin. Cette agressivité sédimentée dans ses muscles, le colonisé va d'abord la manifester contre les siens. C'est la période où les nègres se bouffent entre eux et où les policiers, les juges d'instruction ne savent plus où donner de la tête devant l'étonnante criminalité nord-africaine.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 53-54


Le colonialisme n'est pas une machine à penser, n'est pas un corps doué de raison. Il est la violence à l'état de nature et ne peut s'incliner que devant une plus grande violence.
  • Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon, éd. La Découverte poche, 2002, p. 61


Correspondance[ред.]

Si je ne retournais pas, si vous appreniez un jour ma mort face à l’ennemi, consolez-vous, mais ne dites jamais : il est mort pour la cause. Dites : Dieu l’a rappelé à lui ; car cette fausse idéologie, bouclier des laïciens et des politiciens imbéciles ne doit plus nous illuminer. Je me suis trompé ! Rien ici, rien qui justifie cette subite décision de me faire le défenseur des intérêts du fermier quand lui-même s’en fout.
  • Actes du Mémorial Frantz Fanon de 1982, Frantz Fanon, éd. Présence Africaine, 1984., 1945, p. 269


Citations rapportées[ред.]

Citations sur[ред.]

S'il y a chez Fanon quelque chose qui ne vieillira jamais, c'est bien la possibilité, pour chaque sujet humain et pour chaque peuple, de se mettre debout, d'écrire par son travail, dans sa langue, avec son corps, sa part de l'histoire de ce monde que nous avons tous en commun.
  • « Frantz Fanon, au nom des damnés de la terre », Achille Mbembe (Propos recueillis par Valérie Marin La Meslée), Le Point, 5 décembre 2011 (lire en ligne)


Aujourd’hui, nous sommes des centaines de milliers, aux quatre coins du vaste monde, à reconnaître la force des propositions que le chantre de la libération de l’Afrique nous a léguées, le cap qu’il nous oblige à garder à l’esprit : « Chaque génération doit dans une relative opacité découvrir sa mission, la remplir ou la trahir. »


Voir aussi[ред.]

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